Notes (très longues) sur le >trou noir< du XXème siècle
2 septembre 2015 – Le Japon capitula le 14 août 1945 mais ce n’est que le 2 septembre 1945, il y 70 ans, que l’acte officiel de reddition fut signé. A partir de là, poursuit l’histoire officielle, s’organisa rapidement l’après-guerre qui était déjà sur la voie de se transformer en une période nouvelle qu’on nomma >Guerre froide<, la puissance phénoménale de l'Amérique ayant été installée dans l'entretemps et dès la mi-1945 jusqu'en 1948 sur les principales structures du monde, le camp communiste mis à part. Passons au chapitre suivant dit ensuite l'histoire officielle, comme l'on dirait >Passez muscade<...
Il s’agit d’une des plus saisissantes impostures de l’histoire-Système, qui est acceptée même par la plupart des dissidents du Système et autres antiSystème. Au contraire, le 2 septembre 1945 s’ouvre une période courte mais d’une intensité extraordinaire par sa différence fondamentale, son exceptionnalité par rapport à ce qui précéda et ce qui suivit, une courte période de trois années qui est en elle-même une véritable >époque< chargée de spécificités propres qui se détachent du cours conformiste du récit historique. Cette >époque< commencée le 2 septembre 1945 devait se clore au début du printemps 1948, non par le >coup de Prague< de fin février 1948 mais 1) par l'exploitation que le Pentagone fit du >coup de Prague<, grâce à un montage de communication ; et 2) parce que cette exploitation du >coup de Prague< constituait une opportunité unique pour sauver une partie importante de l'industrie stratégique US (essentiellement aéronautique) sur le point de s'effondrer, alors que les USA luttaient dans l'angoisse la plus complète contre la possibilité d'une nouvelle Grande Dépression. C'est à partir de cette opération de communication que se développa une nouvelle impulsion de politique de sécurité nationale US baptisée >internationalisme< depuis 1937-1941 par l'administration Roosevelt par souci de communication, mais fondée dans ce cas (à partir de 1948) sur l'interventionnisme à l'échelle mondiale avec l'antisoviétisme comme base idéologique et de communication. Nous désignons cette >époque< d'un peu plus de trente mois (septembre 1945-mars1948) comme >le ‘trou noir’ du XXème siècle<, lorsque l'Histoire s'arrêta, hésita, balança avant de basculer dans l'histoire-Système officielle.
Nous allons présenter ce >’trou noir’ du XXème siècle<, essentiellement à l'aide de plusieurs textes d'une longueur assez conséquente. Il s'ensuit que l'>article< qui vous est présenté est d'une longueur inusitée. Le lecteur peut éventuellement passer l'un ou l'autre texte, ou s'y reporter plus tard, en se contentant des grandes lignes que nous lui en donnerons avant de le reproduire. (Les textes cités étant en italique, cet exercice sera d'autant mieux facilité pour ceux qui choisissent cette voie. L'un des textes cités reproduit un article déjà mis en ligne en 2003, mais avec quelques légères modifications et adaptations [entre braquets] affectant la forme ou précisant certains points du fond.)
Bien entendu, le >héros< fort ambigu et faussaire de cette période et de ces textes est >l’Amérique<, c'est-à-dire les USA ou États-Unis, dont on crut et dit qu'elle dominait d'ores et déjà le monde durant cette période alors qu'elle était en réalité dans une position de complète confusion malgré sa puissance incontestable dans un monde dévastée (et puissance incontestable puisque le monde était dévasté) ; avec un exécutif chancelant, le Congrès ayant brutalement repris la main sur des points essentiels dès la paix acquise ; privée de l'essentiel de sa formidable puissance militaire en quelques mois ; au bord de l’effondrement économique (une production de guerre considérable stoppée net et des industries stratégiques effectivement au bord de l’effondrement), tout cela ravivant le cauchemar de tous les Américains …
On rappellera à cet égard, comme une indication symbolique fondamentale, que les sondages donnèrent avec constance, tout au long de la Deuxième Guerre mondiale, lorsqu’il était demandé au public quelles étaient ses préoccupations dans l’ordre des priorités : 1) le retour de la Grande Dépression, et 2) la victoire contre l’Allemagne et le Japon.
Cette introduction nous conduit, pour être complétée d’une façon adéquate, à redonner ici un extrait d’un texte du 10 août 2015, qui reprend succinctement une description de ce que sont fondamentalement les USA. Il s’agit d’un pays extrêmement différent des nations européennes, – dans tous les cas, des plus importante, – telles qu’on les connaît. Cette vérité historique selon nous permet de comprendre les diverses péripéties de cette période, notamment par l’absence d’une puissance régalienne impérative imposant une politique clairement définie.
«Il s’agit donc d’un Moment qui est presque un >instant historique<… L'instant, comme un temps suspendu, ressemble à celui-ci, lorsque la formule 'the end' apparaît sur l'écran, que la lumière grandit par saccades successives dans la salle, que le rideau commence à se fermer, que les premiers fauteuils claquent, que les dernières mesures de la musique de la séquence de conclusion, sirupeuse ou martiale, pompeuse ou romantique mais toujours stéréotypée, courent encore dans les derniers filets de l'air d'un temps qui s'achève… Le film est fini, se dit-on, – mais est-ce bien sûr ? Ainsi en est-il lorsque vous émergez, comme l'on sort d'une cage délicieuse où s'est enfermé l'esprit, d'une séance orchestrée, dans le noir, par cette lanterne magique ; envoûtement du magicien, qui se brise ; incertitude, hésitation entre la représentation qui s'éloigne dans le souvenir et cet ersatz de réalité, d'une nature qu'on juge encore comme une imposture, qui prétend reprendre sa place ; on semble, enfin, hésiter entre les deux, et les jeux ne sont pas faits… Dans cet instant de vertige qui suit cette guerre, alors qu'on commence à en découvrir les destructions inimaginables et qu'on mesure le chaos qui semble emporter le monde à partir d'elle, nul ne sait le choix que va faire l'Amérique. Par ailleurs, est-ce bien le cas que l'Amérique ait à faire un choix, comme si l'on écartait l'évidence écrasante que sa voie est celle de l'inspiration directe de Dieu, que cela ne suscite la nécessité d'aucun choix ? Ainsi l'Amérique nous semble-t-elle énigmatique non parce qu'elle hésite à faire son choix mais parce que sa situation hors de notre champ terrestre ne nous permet pas d'en rien savoir à cet égard, qui est notamment à l'égard de ses projets. Ainsi ne nous viendrait-il pas l'idée de lui reprocher de nous avoir fait languir à propos de l'orientation qu'elle va prendre.
»En juin 1945, sur le chemin de la conférence de Potsdam, le président Truman avait visité les camps des G.I.’s attendant leur démobilisation et leur avait confié qu’une autre grande bataille les attendait ‘at home’, la bataille pour empêcher le retour de la Grande Dépression ; ainsi Truman, involontairement, sépare-t-il l’essentiel (le destin américaniste dont la Grande Dépression est un passage essentiel, sinon re-fondateur) et l’accessoire (cette >Grande Guerre américaniste< en technicolor). Vous comprenez alors que cette période, cet interstice, cette échappée comme une évasion d'une suite qui semble sans fin, dans une évolution qui semble écrite d'un seul trait, d'une seule plume, d'une seule main, cette rupture sans espoir réserve un éclairage étrange sur les forces souterraines qui nous guettent et, bientôt, un demi-siècle plus tard, s'imposeront à nous ; cinquante ans plus tard, et ces 'forces souterraines', un instant émergées en 1945-1947 avant de replonger dans l'obscurité avec la Guerre froide, réapparaîtront pour ne plus nous quitter jusqu'au décompte final.
»Il faut une image à la fois poétique et décisive pour nous faire pénétrer dans cette portion d’univers qui nous attache et nous intrigue à la fois, et nous angoisse déjà, qui soit la clef pour tourner le verrou. ‘Le troisième homme’, ce film de 1949 de Carol Reed, avec Orson Welles, Joseph Cotten, Alida Valli et Trevor Howard, fait office de cette clef qui ouvre sur l’interstice d’angoisse, qui rouvre nos sens et nourrit une intuition, un instant, sur notre crise fondamentale. Le film n’apporte rien d’une explication, d’un raisonnement, non, il offre un climat qui transmute l’univers. La chose se déroule dans la Vienne de l’immédiat après-guerre, divisée en quatre, ville torturée, blessée, démembrée, écartelée, – sillonnée par les patrouilles des troupes d’occupation, où règnent la peur de l’avenir et l’effroi devant l’inconnu, avec tous les stigmates et les affreuses blessures de la guerre, les ruines, les queues du rationnement, les êtres louches, perdus, les femmes qui ont été belles, les gamins aux joues creuses qui apprennent à chaparder un sou, les barons d’un autre temps transformés en clochards et qui n’ont gardé de leur ancienne splendeur qu’un manteau d’une fourrure luxueuse et désormais mitée par le temps des tempêtes, tous des survivants d’on ne sait plus quoi ; le noir d’encre de la nuit du monde, le crépuscule de la guerre qui s’étend comme si cette guerre montrait toute sa stérilité à engendrer une paix ; les ombres de la nuit, déformées, démesurément étirées, des fugitifs solitaires dans les rues désertes, les claquements secs et renvoyés de mur en mur, de pierre en pierre, des pas précipités et des fuites haletantes, l’humidité insipide et insolite, la neige éparse et salie, l’extraordinaire assombrissement du monde ; la déformation asymétrique de la caméra qui nous restitue une vision fantasmagorique des façades des vieilles maisons de l’Empire enfui, les pentes des rues serpentant entre des ruines épisodiques, les pavés rebondis et luisants d’humidité, tout cela encore déformé par les prises de vue insolites où l’on imagine sans peine la patte insistante de l’influence de Welles, les clairs-obscurs sinistres et sombres, plus obscurs que clairs, comme s’il existait une lueur diffuse propre au couvre-feu, qui serait presque une lumière noire. Le film nous conte un autre univers dont on a peine à croire qu’il ne s’agit pas de l’univers vrai de cette période… L’appréciation, effectivement, d’un court laps de temps entre les deux guerres, la Deuxième et la Guerre froide, nous justifie de cette impression qui est bientôt une conviction. Il s’agit de quelques mois, une ou deux années, à peine plus, qui semblent avoir été dérobés à l’histoire officielle de la période, à la ‘narrative’ à laquelle nous sommes conviés de croire.
»Il s’agit d’un temps singulier, celui où les Européens, qui avaient décidé de soumettre leur destin à l’Outre-Atlantique, s’en crurent soudain abandonnés. Durant les deux années de 1945 à 1947, les Britanniques, si complètement engagés dans cette étrange Arche de Noé transatlantique, s’en crurent soudain quittes, simplement comme l’on est proche de constater un fait, et crurent urgent et judicieux de presser les Français de constituer une alliance européenne pour ces temps difficiles. Il en résulta le Traité de Dunkerque, qui est pour une bonne part l’œuvre de l’ambassadeur britannique à Paris Robert Duff-Cooper, qui est un Britannique étrange, un de ces rares Britanniques dans lesquels les Français devraient avoir confiance. Ce ne fut pas vraiment le cas de De Gaulle, et je ne serais pas loin de penser qu’en ces années 1945-1946 où il se raidit contre les Britanniques, pour des raisons apparemment justifiées, de Gaulle commit une de ses rares fautes marquantes. Qu’importe, le temps ne dura pas et, bientôt, les temps changèrent.
»Il s’était pourtant agi d’un temps où Raymond Abellio annonçait pour le presque-aussitôt, >un nouveau Prophétisme< ('Vers un nouveau prophétisme', A l'enseigne du Cheval Ailé, Genève, 1947). Il pensait qu'il était temps que l'Histoire acceptât dans son sein, à nouveau, >le prophétisme<. >[N]ous sommes entrés dans une période diluvienne, analogue à celles qui virent la disparition de l’Atlantide, de la Lémurie ou de l’Hyperborée, et […] se trouve ainsi ouverte une ère de bouleversements planétaires et d’effondrement des continents. Tel est le fait prophétique du moment… < S'adressant aux >âmes fortes<, donc peu nombreuses, de son temps, Abellio entendait >rechercher avec elles, comment, par le Prophétisme, la spiritualité se trouve engagée dans le drame contemporain et, spécialement, comment il s’insère dans la politique, sans cesser de lui être irréductible… < C'est aussi notre ambition, près [de trois-quarts] de siècle plus tard, alors qu’effectivement les mêmes conditions métahistoriques qu’on put percevoir en 1945-1947 sont réapparues, de convoquer la métaphysique pour grandir à leur vraie mesure l’appréciation et l’interprétation des événements extraordinaires du fil de notre temps. Ce n’est pas une ambition personnelle mais une ambition naturelle, sinon nécessaire et décisive, que nous impose ce temps justement, en nous offrant des conditions bien plus favorables pour nous exécuter. On ne fait, dans ce cas, que s’incliner avec humilité devant des exigences d’une telle hauteur.
»Dans ce même temps (1945-1947), le philosophe de l’histoire et historien des civilisations Arnold Toynbee entreprend une série de conférences qu’il réunira plus tard en un volume (‘La civilisation à l’épreuve’, publié en 1948), où il met en évidence l’angoisse née de la contradiction entre l’absence de sens de notre civilisation et sa formidable puissance technologique, et peut-être, cette angoisse, justifiée encore plus par l’impasse de notre civilisation telle qu’elle s’impose en 1945, – l’impasse, peut-être, si le Prophétisme réclamé par Abellio n’est pas réalisé. Toynbee observe que notre civilisation est prisonnière de son énorme puissance technique, ou technologique, qu’elle est déséquilibrée tragiquement, jusqu’à l’insupportable, par l’absence de sens. C’est une rupture dans la continuité successive des civilisations, dont aucune de celles qui précédèrent la nôtre ne fut assez déformée et invertie d’une façon maléfique sur sa pente décadente pour empêcher, par sa puissance, la suivante d’émerger. >Pourquoi la civilisation ne peut-elle continuer à avancer, tout en trébuchant, d'échec en échec, sur le chemin pénible et dégradant, mais qui n'est tout de même pas complètement celui du suicide, et qu'elle n'a cessé de suivre pendant les quelques premiers milliers d'années de son existence? La réponse se trouve dans les récentes inventions techniques de la bourgeoisie moderne occidentale.< (Karl Jaspers dit une chose similaire, lorsqu'il écrit dans La Table ronde, numéro de mai 1953 : >Ici, l’élément nouveau, différent, absolument original, que l’on ne saurait comparer à rien de ce que peuvent offrir l’Asie et même la Grèce, ce sont la science et la technique modernes de l’Europe. Derrière nous, l’histoire montre une continuité, voire une unité dont Hegel, le dernier, a décrit la majestueuse grandeur. Tout change avec la technique moderne… <)
»Il s’agissait même d’un temps où l’Amérique elle-même songeait à ce problème, que le sociologue William F. Ogburn identifie sous l’expression de ‘Cultural lag’ (‘décalage culturel’). Il s’agit bien de constater, pour éventuellement la mesurer, l’importance de la chose, pour tenter d’y apporter des corrections. Il s’agit de lutter contre le déséquilibre formidable et en constante croissance entre le développement de la puissance technique et le reste. (Il est étrange, ou bien non, il est significatif, que l’américanisme songe à envisager ce problème, plus par les yeux du sociologue que par ceux de l’historien ou du moraliste.) Le dissident de l’américanisme Daniel Ellsberg expose effectivement combien la question était à l’ordre du jour, alors qu’il se trouve au collège, qu’il a 14 ans, à l’automne de 1944…
«> …Notre professeur, Bradley Patterson, débattait pour notre avantage d’un concept qui était alors familier en sociologie, qui était la notion de ‘décalage culturel’ de William F. Ogburn.
»>L’idée était que le développement de la technologie se faisait, avec régularité, beaucoup plus rapidement et sur des distances beaucoup plus longues dans l’évolution socio-historique humaine, que les autres aspects de la culture: nos institutions de gouvernement, nos valeurs, nos comportements, notre compréhension de la société et de nous-mêmes. Ce qui ‘traînait’ en arrière, ce qui se développait plus longtemps ou ne se développait pas du tout dans l’adaptation sociale aux nouvelles technologies comprenait tout ce qui concernait notre capacité de contrôler et de diriger [le technologisme] et l’utilisation du [technologisme] pour dominer les autres êtres humains.< (Nous avons jugé plus approprié, sans trahir l'esprit de la citation, de remplacer le seul terme anglais de >technology< par >technologisme< pour donner à l'idée exprimée toute sa puissance conceptuelle, notamment en l'extrayant de la possibilité d'une compréhension seulement technique.)
»C’est dire, au travers d’exemples si divers, qu’il s’agit d’un si court laps de temps, comme un >trou noir< furtif glissé dans une histoire qui semble déjà écrite. Il mérite d'être mentionné, ce >trou noir<, il doit être mentionné comme significatif du malaise latent de notre civilisation devenue système, comme une reprise brève et sans espoir de 1919-1933 dont nous avons parlé plus haut. C'est comme si les deux conflits se comportaient, à leurs termes, eux aussi mimétiquement, par un temps d'incertitude sur le sens des choses, – mais 1945-1947, bien entendu, infiniment plus court et infiniment moins significatif que 1919-1933.
»Disons qu’il est évidemment >trop tard<, que le sort en avait été jeté précédemment, qu'il ne s'agit que d'un répit, une halte, une étape occasionnelle avant que la dynamique ne reprenne le dessus. Que certains y voient autre chose, comme un signe du destin, un avertissement de plus, inutile, déjà dépassé, d'une puissance extérieure à nous et d'essence métahistorique, qui observe notre chute, eh bien ils n'ont pas tort ! Mais l'Amérique et son >idéal de puissance< sont en train de se transmuter en une irrésistible référence ; l'Amérique est en train d'accoucher comme en une césarienne cosmique d'une dynamique politique qui a comme ambition à peine secrète d'imposer au monde cet >idéal de puissance<, avec une force à vous couper le souffle, à vous interdire la réflexion, à vous emporter sur les ailes puissantes des escadres de bombardiers de la liberté… C'est la communication qui nous y conduit, à grand train parmi les ruines du monde, à son rythme trépidant, de l''American Dream' revu par le 'swing' de Glenn Miller, qui semble donner le tempo aux livraisons américanistes et modernistes du Plan Marshall, – ce nouveau catéchisme des croyants de l'après-guerre, – déposées comme dans nos petits souliers en attente du Père Noël, dans les ports européens dévastés. C'est la communication qui nous presse, nous bouscule, contraint notre pensée comme on compresse de la vile matière, – car enfin, il n'est plus temps de douter ! Hors de nous, ces vilaines et sombres pensées de décadence et de tragédie ; dans une sorte de révolution copernicienne de la perception, n'en déplaise à Copernic, Galilée & Cie., il est désormais acté solennellement que le soleil se lève à l'Ouest.»
Notes
(1) Le ‘Report on the Status of Demolibilization and Postwar Planning‘ fut déclassifié en 1972. Pour son livre La drôle de détente, Philippe Grasset en obtint une copie selon la procédure légale de communication des documents officiels déclassifiés. A sa connaissance, le rapport n’a nulle part été utilisé dans tous ses détails sur la planification de l’après-guerre à partir de la capitulation du Japon prévue pour novembre 1946. Il est vrai, bien entendu, que cette planification, avec le poids qu’elle exerçait sur l’orientation de la politique générale des USA, bouleverse effectivement, comme nous l’estimons dans cette longue analyse, toute l’histoire de cette période cruciale 1945-1948.
(2) Paru chez St-Martin Press, à New York. Nous précisions en 1995, lors de la publication de la première version de cette analyse du texte de Kofsky : « …’The War Scare of 1948′ a été publié en 1993 et nous n'en parlons qu'en 1995. Deux ans, à notre époque de communications intensives, c'est beaucoup. […] [C]ertes, deux ans c'est beaucoup si nous pensons que ce livre apporte une contribution essentielle à la mise à nue d'une époque si importante. Pourtant, il n'a guère eu d'écho aux États-Unis également, où nous n'avons relevé aucune publication (critique, recension, etc.) à son propos. Pourquoi? Une première hypothèse est qu'il transgresse une règle très importante de notre époque : il décloisonne les spécialités. Le sujet concerne l'industrie aéronautique américaine, le Pentagone, le complexe militaro-industriel. En même temps, il concerne la politique occidentale, la sécurité européenne, notre analyse de la Guerre Froide, les fondements étranges de nos liens avec les États-Unis, et ainsi de suite. Une seconde hypothèse est que les thèses de Kofsky sont trop radicales pour n'avoir pas suscité un barrage de l'establishment. Dans ce cas, la meilleure arme est le silence. Sans doute les deux causes s'additionnent-elles…. »
(3) L’influence américaine sur la politique française, 1945-1954, lrwin M. Wall, Balland, Paris 1989.