Effectivement, les Anglo-Américains, qui sont friands, dans leur langage courant, d’expressions et de mots français, font grand usage, en français dans le texte, de l’adage du vieux bon sens populaire : Plus ça change, plus c’est la même chose. L’adage pourrait être ressorti à l’occasion des rumeurs de délibérations au sein des grandes commissions parlementaires US, sur les réformes nécessaires à entreprendre au Pentagone.
On voit par ailleurs, aujourd’hui, la mention notamment de la nouvelle législation Levin-McCain concernant les dépassements de coût des programmes de défense. Une analyse du site GovExec.com, en date du 24 février situe l’importance de cette législation, qui est loin d’être négligeable. Puis il signale les initiatives en train d’être conduites dans le but d’un travail de réforme, notamment au sein de la Commission des forces armées du Sénat (Levin et McCain en sont les présidents de la majorité et de la minorité), cela, après avoir signalé le mécontentement du président Obama devant la pharaonesque affaire de la flotte présidentielle d’hélicoptères (le Marine One et ses acolytes). La Commission (AFSC) devrait devenir, conduite par Levin-McCain dans un mode bipartisan, une des forteresses de la réforme du Pentagone au sein du Congrès.
«Defense procurement was one of several issues discussed in depth on Monday during President Obama’s fiscal responsibility summit. Following a series of breakout sessions, including one on procurement, Obama held a briefing with reporters and participants. He directed the first question to McCain, who had participated in the procurement session. The Arizona lawmaker cited upgrades to Marine One the president’s helicopter as an example of procurement excess. At $11.2 billion, the project is now more than 50 percent over budget.
»Obama said he had already spoken with Defense Secretary Robert Gates about conducting a thorough review of the helicopter situation, adding the contract was an example of the procurement process gone amok.
»At the earlier breakout session on procurement, lawmakers hashed out ways to improve the acquisition system governmentwide. According to a White House pool report from Washington Times reporter Jon Ward, many participants said the government must refocus on competition and make better use of fixed-price contracts. Others called for having federal employees do certain jobs that contractors perform.
»Sen. Susan Collins, R-Maine, repeated oft-heard pleas to beef up the acquisition workforce, which has declined by 22 percent since 2001. The senator predicted the situation could become even more precarious in the coming years as half the procurement workforce is eligible to retire by 2012.»
On fera deux remarques autour de ce développement d’activités réformistes concernant le Pentagone.
La première, effectivement, c’est Plus ça change, plus c’est la même chose. La loi Levin-McCain demande un retour au processus des prototypes et de la compétition dans les programmes de défense (mesure directement liée à la catastrophe du JSF, et qui prend implicitement acte de cette catastrophe). C’est un retour à une pratique courante jusqu’au F-22 (compétition entre le Lockheed Martin YF-22 et le Northrop YF-23 jusqu’en 1992). De même, les mesures discutées au sein de la AFSC prévoient un transfert à des fonctionnaires fédéraux de tâches affectées aux contractants privés, renversant complètement le mouvement lancé par l’administration Clinton, dans les années 1990, de privatisation du Pentagone. En fait de réforme, on ne voit rien pour l’instant qu’un retour aux anciennes formules, ce qui peut paraître ironique ou pathétique puisque le sort du Pentagone était déjà très affligeant avant sa privatisation; mais la chose doit être vue différemment, pour constater qu’on peut ainsi mesurer indirectement combien la privatisation et le reste, dans le sens de la globalisation, ont accéléré dramatiquement la catastrophe en cours au Pentagone. Nous en sommes, pour l’instant, à boucher les voies d’eau les plus voyantes, et elles viennent toutes de l’application sans restriction du système de la globalisation et de la privatisation du monde, et du Pentagone par conséquent. On revient donc là-dessus, sans commentaire.
Il n’empêche, après de nombreuses autres indications, ces précisions nous confirment que le rythme du mouvement de réforme du Pentagone ne fait qu’accélérer. Les principaux centres réformistes montent en puissance actuellement, tant dans l’administration qu’au Congrès. Les institutions qui vont aider à ce mouvement préparent leurs dossiers, au GAO notamment, qui prépare ses rapports du printemps (mentionnons en mars un rapport sur le JSF). Pour l’instant, le constat intéressant n’est certainement pas de savoir si la réforme a une chance de réussir, quelle voie elle va prendre, etc., et, d’ailleurs, il est fort possible que ce constat-là ne devienne jamais très intéressant, si les événements en décident ainsi. La chose qui importe est cette montée en puissance, ce rythme qui grandit et s’impose de plus en plus puissamment. Effectivement, cette dynamique est essentielle, non pour la réforme qu’elle engendrerait ou pas, efficace ou pas, etc., mais d’abord pour la tension explosive qu’elle installe d’ores et déjà, progressivement mais de plus en plus rapidement. Cette tension explosive mène éventuellement à une confrontation entre les pressions réformistes et la résistance de la bureaucratie. L’enjeu, il faut bien en avoir conscience, c’est moins la réforme que le possible crash du Pentagone.
Mis n ligne le 26 février 2009 à 18H30